Danièle exerce le métier de sage-femme depuis de nombreuses années. Aujourd’hui libérale, elle s’est orientée dans la préparation à l’accouchement et accompagne les femmes, durant leur grossesse, dans son cabinet.
Elle nous accord un peu de son temps pour nous parler de son métier.
Bonjour, pouvez-vous vous présenter ?
Je m’appelle Danièle, je suis sage-femme depuis un certain nombre d’années, j’ai exercé essentiellement en secteur hospitalier un peu en France, surtout en Nouvelle-Calédonie et Tahiti et depuis 15 ans je travaille en libéral.
Quand avez-vous su que vous souhaitiez devenir sage-femme ? Pourquoi avez-vous été attirée par ce métier ?
Je pense qu’il s’agit d’une vocation pour la plupart de mes collègues. Mon parcours a été plus atypique. J’enseignais les mathématiques et la physique-chimie dans les collèges et c’est lors de ma première grossesse que j’ai découvert le métier de sage-femme, un métier que j’ignorai totalement auparavant .Après avoir été si bien accompagnée autant médicalement que psychologiquement par ma sage-femme j’ai voulu à mon tour exercer ce métier au service des femmes au moment sûrement le plus important et le plus beau de leur vie.
En quoi consiste la préparation à l’accouchement ?
La préparation à l’accouchement consiste en une information théorique et pratique sur le déroulement de la grossesse, de l’accouchement et des suites de couches et les premiers jours avec bébé. Elle a pour but de donner confiance aux femmes dans leur capacité d’accoucher et de réduire cette anxiété si naturelle que ressentent la plupart des femmes dans cette période de leur vie.
Quelles sont les différentes préparations à l’accouchement ?
Il y a différentes méthodes de préparations à l’accouchement :
- La méthode traditionnelle : la plus pratiquée, elle consiste à expliquer pas à pas chaque étape que va vivre la future maman, elle est particulièrement adaptée pour une première grossesse. La partie théorique est complétée par une partie pratique comportant des exercices de respiration, de relaxation, l’apprentissage des postures et de la poussée.
- La sophrologie : par des exercices respiratoires, de détente corporelle, de visualisation positive, cette technique instaure un climat de bien-être permettant à la jeune maman de comprendre et de maîtriser son corps en cas de stress ou d’anxiété.
- L’haptonomie : appelée également science de l’affectivité, cette méthode permet de communiquer in utéro avec bébé et d’établir une relation profonde de contact, le bébé qui se sent aimé construit sa sécurité de base et sa confiance dans ses capacités. Le père a un rôle prédominant dans cette technique, le contact affectif lui permet d’établir un lien sentimental avec le bébé dès la grossesse, il apprend aussi comment aider et assister sa femme au moment de la naissance.
- La méthode Bonapace : cette technique est validée par des recherches scientifiques et fondée sur les principes de la neurophysiologie de la douleur. .Elle favorise l’accouchement naturel et la participation du papa et permet de maîtriser la douleur par le biais de différends massages, de digitopression, du contrôle de la respiration et de la visualisation positive. Le père a un rôle particulièrement actif dans la gestion de la douleur et cela permet de réduire les interventions médicales souvent liées à des blocages induits par la douleur.
- Le yoga : il vise à harmoniser le corps et l’esprit, des techniques de respiration permettent de diminuer l’intensité douloureuse des contractions, de faciliter la dilatation et la poussée. Le travail corporel repose sur des postures et des étirements spécifiques et permet de traiter les petits maux de la grossesse.
- Le chant prénatal : cette méthode est basée sur l’utilisation des vibrations de la voix. Elle permet de soulager la douleur par un effet antalgique de certains sons et de mieux maîtriser sa respiration. L’accouchement prend une tonalité joyeuse…
- La préparation en piscine : permet de profiter de l’apesanteur induite par l’eau, cette méthode comporte différents exercices visant à soulager les douleurs lombaires et ligamentaire, elle permet de maîtriser le souffle et tonifie en douceur la sangle abdominale très utile pour la poussée.
- La fasciathérapie : consiste en un toucher doux et profond qui permet de dénouer les tensions, traiter les douleurs. La fasciathérapie aide les futures mamans à développer la perception qu’elles ont de leur propre corps permettant ainsi de favoriser une relation précoce avec leur bébé.
- L’hypnonaissance : cette préparation aide les femmes à vivre leur grossesse et leur accouchement dans la sérénité, elle repose sur la pratique de l’autohypnose et permet de se débarrasser du stress en se focalisant sur le ressenti. Elle utilise des techniques de respirations, de relaxation, de visualisation.
- L’acupuncture : cette méthode prépare à l’accouchement en assurant la libre circulation des énergies dans le corps et en équilibrant le yin et le yang.
La préparation traditionnelle, la sophrologie, l’haptonomie, le yoga, la préparation en piscine, la méthode Bonapace sont accessibles à Tahiti.
On entend beaucoup parler de « projets de naissance », de quoi s’agit-il exactement ?
Il s’agit d’un document écrit dans lequel les futurs parents indiquent leurs souhaits pour l’accouchement, l’accueil du bébé et le séjour à la maternité. Avec ce projet ils deviennent acteurs de la naissance de leur bébé.
Il n’y a pas de projet type car les désirs exprimés sont propres à chacun.
Ce document, véritable outil de dialogue, sera soumis à l’équipe médicale qui validera ou non les désideratas en fonction du respect de la sécurité médicale et des possibilités de chaque maternité.
Il faut que les parents restent conscients qu’il ne sera peut-être pas toujours possible de respecter ce projet de naissance car tout va dépendre des circonstances de l’accouchement.
Peut-on programmer son accouchement ?
Il est possible de programmer son accouchement pour deux raisons
- Raison de convenance personnelle qui peut être proposée par le médecin souvent pour une meilleure organisation de service ou s’il doit s’absenter au moment prévu de la naissance ou par les parents pour diverses raisons. Cette programmation doit être acceptée conjointement. Elle se fait au-delà de 38 SA et sur un col favorable afin d’éviter des complications
- Une raison médicale lorsque la poursuite de la grossesse pourrait mettre la vie de la mère ou du bébé en danger, dans ce cas c’est le médecin qui propose ce déclenchement. La programmation se fait quel que soit le terme et l’état du col.
La tendance est à vouloir revenir au naturel, accoucher sans péridurale, dans l’eau, à domicile… Que pensez-vous des accouchements naturels ?
Par définition l’accouchement est un acte physiologique donc qui à priori se passe bien et ne devrait pas nécessiter de médicalisation.
La pathologie survient parfois et la médicalisation est alors nécessaire et incontournable
Dans notre société tous les accouchements ont été médicalisés sans tenir compte de la physiologie avec des protocoles systématiques qui ne se justifient pas toujours…Actuellement beaucoup de femmes veulent se réapproprier ce moment intense de leur vie et redevenir actrice de leur accouchement.
Elles veulent avoir le choix d’accoucher naturellement et si les circonstances de l’accouchement le permettent l’équipe médicale doit les accompagner dans ce choix.
Chaque maternité devrait pouvoir proposer des pratiques alternatives et ne réserver la médicalisation qu’aux accouchements pathologiques.
Est-ce une demande courante en Polynésie ?
En Polynésie la demande d’accouchement naturel sans péridurale, avec le minimum de médicalisation est forte mais l’accompagnement en salle de naissance est différent et nécessite une présence et un soutien important de la part de l’équipe médicale.
Que conseilleriez-vous à une femme qui souhaite accoucher sans péridurale ? Comment se préparer ? Quels sont les moyens pour soulager la douleur ?
Le conseil à donner à une future maman qui veut accoucher sans péridurale est d’abord une bonne préparation à la naissance afin qu’elle connaisse exactement les mécanismes de l’accouchement, qu’elle ait confiance en son corps.
Il faut qu’elle soit à l’écoute de ce corps et qu’à chaque contraction elle trouve instinctivement la posture qui la soulage.
La mobilité est primordiale, la respiration ample et profonde également, l’oxygénation qui en découle est indispensable au bon fonctionnement de son utérus et bénéfique pour le bébé.
Elle doit laisser aller la douleur et ne pas lutter contre elle car elle risque de créer des blocages qui pourraient entraver l’ouverture du col et rendre l’accouchement long et difficile.
Le meilleur moyen pour ne pas se focaliser sur la douleur est d’entrer en communication avec son bébé au moment de la contraction.
La douleur peut aussi être soulagée par un bain, une douche chaude, le massage des zones douloureuse, la stimulation de points d’acupuncture selon la méthode Bonapace, ce qui, au moment des contractions, permettra la production d’endorphines.
En résumé il faut être très active, marcher, bouger entre les contractions, s’immobiliser dans une posture qui soulage au moment de la contraction douloureuse, adopter une respiration ample et profonde et se connecter à son bébé.
Et si la douleur devient trop difficile à gérer, ce n’est pas un échec que d’avoir recours à la péridurale, l’essentiel est d’être allé le plus loin possible dans son projet.
Quel est le plus beau souvenir de votre carrière ?
J’ai accumulé beaucoup de beaux souvenirs dans ma carrière et il est difficile d’en choisir un, mais peut-être l’année dernière la naissance d’une jolie petite fille dans mon cabinet, sa maman n’ayant pas eu le temps de se rendre à la maternité.
L’accouchement est similaire à la traversée d’une rivière tumultueuse, si on se laisse porter par le courant sans lutter inutilement on est sûr d’arriver sur la berge à un moment ou à un autre…