Concentré sur le choix de ma pièce de thon à acheter pour mon sashimi de ce soir, je me sens observée. Doucement je lève ma tête, et je croise les yeux de ce jeune inconnu. C’est le séisme, mes joues rougissent timidement, une délicieuse chaleur m’envahit et pour couronner le tout, mon cœur s’emballe. Vite, je détourne maladroitement le regard. Cupidon existerait-il vraiment ou ne serait-il simplement que le résultat d’un tas de réactions biochimiques dans mon cerveau … ? Actu Santé Fenua vous explique ce qu’il se passe lors des comportements de séduction.
Le cerveau aux commandes de l’amour
L’amour n’est pas un dossier réservé au cœur, mais c’est surtout l’affaire du cerveau. Qu’il n’en plaise aux fleurs bleues, l’amour pourrait s’expliquer grâce aux neuroscientifiques. Les recherches avancent et on identifie aujourd’hui les substances biochimiques et les réseaux neuronaux qui sont en jeu, la manière dont ils agissent et collaborent. Tout d’abord, rappelons que l’amour, qu’il soit passionnel, romantique ou physique est avant tout le résultat d’une mécanique complexe, mêlant pulsions et envies, colorées d’interdits et d’inhibitions. C’est un processus biochimique naturel, car ne l’oublions pas nous sommes des mammifères génétiquement programmés pour tomber amoureux et assurer la reproduction de notre espèce. De l’attirance, à la passion, puis à l’attachement, de l’envie sexuelle, au manque, notre cerveau déclenche, module et active un système de circuits de neurones complexes.
Découvrez les trois étapes de l’amour
L’amour se décline en trois étapes successives, du désir sexuel, à la passion puis à l’attachement durable. Ce qu’il se passe c’est que différentes zones de votre cerveau vont se mettre en marche et se mélanger avec des hormones et des substances biochimiques qui vont provoquer une excitation et créer des altérations sensorielles. Plutôt magique non ?
Phase n°1 : Le désir, t’as de belles molécules tu sais ?
Le cerveau est au commande en produisant des hormones et autres molécules du désir, nous poussant à chercher un partenaire en vue de la reproduction. On retrouve notre côté animal ! Notre odorat s’enclenche et détecte des messages invisibles qui influencent nos choix de partenaires. Ce sont les phéromones, des substances chimiques fabriquées puis envoyées à l’extérieur de l’organisme pour agir sur un autre individu. Ces dernières sont émises par la plupart des animaux et peuvent déclencher de nombreux types de comportements : fuite, rejet, reproduction, marquage de territoire. Bien que moins importantes chez les hommes, le rôle des odeurs participent à nos attirances et nos répulsions. Combien de fois on a senti des odeurs qui dérangent, « il sent une horrible odeur le tabac », ou vous n’aimez pas l’odeur de sa peau, sa transpiration vous dégoûte, ce qui peut stopper net les échanges amoureux. Ainsi, lors de la rencontre, « l’odeur » de l’autre va prendre une importance considérable afin de déterminer si les deux êtres sont compatibles. Une fois l’étape des phéromones passée, le désir est associé à une hormone : la testostérone, plus elle est présente et plus le désir ainsi que la fréquence des rapports sexuels sont importants. C’est également cette hormone qui régule les caractères sexuels, le développement de la musculature, de l’ossature, la perte de graisse, les fonctions cérébrales de la compétitivité, de l’agressivité, etc… Un bon taux de cette hormone permet souvent de se prémunir de maladies ou désagréments tels que l’impuissance, le diabète, l’ostéoporose ou encore la dégénérescence cérébrale…
Les phéromones, la testostérone et les œstrogènes tissent alors les premiers liens entre deux personnes. Une fois le lien établi, place à la passion !
Phase n°2 : La passion
Le cerveau active le désir/plaisir en jouant sur le système de récompense. Les pupilles dilatées, la transpiration, le stress, l’augmentation du rythme cardiaque et respiratoire : le résultat du cocktail de nos neuromédiateurs comme la dopamine, la sérotonine et la noradrénaline. Une recette biochimique qui provoque une augmentation de la vigilance, de l’attention dirigée et de l’excitation du corps. L’autre capte littéralement toute notre attention, on est attiré, on a envie de passer du temps avec son partenaire car nos hormones et neuromédiateurs induisent une sensation de bien-être qu’on a envie de faire durer encore et encore. Et dès que l’on est loin de l’autre on ressent un manque.
Une onde de plaisir parcourt alors les deux êtres qui se retrouvent. Notre énergie se développe et toute l’attention est centrée sur une seule chose : le sentiment amoureux qu’on éprouve pour le partenaire. La dopamine touche les circuits du cerveau impliqués dans le jugement, la faculté de discernement et l’esprit critique. En somme, la sécrétion des hormones tels que la dopamine (la motivation), l’endorphine (le plaisir, l’euphorie), la sérotonine (le bien être), ou encore l’ocytocine (l’attachement), diffusent des sensations agréables et inhibent les éventuels petits défauts ! La biochimie rend aveugle et inconscient, le cerveau se retrouve tout chamboulé nous empêchant de ressentir de la méfiance ou de la suspicion. La raison est simple et d’ordre génétique, la reproduction et la perpétuation de notre espèce. En effet, pour que notre espèce perdure, notre cerveau est programmé pour que nous éprouvions un amour inconditionnel pour notre moitié assez longtemps pour nous reproduire. On comprend mieux l’expression l’amour rend aveugle non ?
La dopamine n’est pas seule responsable, il y a également l’adrénaline. Cette dernière, joue un rôle important, notamment en ce qui concerne l’accélération du rythme cardiaque, la transpiration, l’excitation, le trop-plein d’énergie, l’estomac qui se noue. Des symptômes qui ressemblent à ceux du stress. Chez les amoureux, la rencontre avec l’être aimé engendre aussi ce genre de réactions.
Puis, il y a la sérotonine, ou plutôt le manque de sérotonine, responsable de notre déficit d’attention pour tout ce qui nous entoure, sauf bien sûr l’être aimé. Nos inhibitions sont affaiblies. La relation amoureuse semble être une situation idéale. La sérotonine nous tient dès lors « ensemble », jusqu’à la phase suivante de la relation : l’attachement.
Phase n°3 : L’attachement, place à la relation durable
C’est la phase de la formation d’un couple stable et l’ocytocine, produite par l’hypothalamus, prend le relais. La « love hormone » est notamment libérée au moment de l’accouchement pour favoriser l’attachement entre la mère et son enfant mais aussi pendant les câlins et l’orgasme. Cette hormone contribue à l’attachement à long terme et participe aux mécanismes biochimiques de l’amour. C’est la véritable hormone de l’intimité, inhibant les réactions au stress, et favorisant une relation calme, apaisée. Elle va également activer les régions du cerveau pour percevoir le plaisir avec les endorphines, l’anandamine et la sérotonine.
Les endorphines sont notamment générées afin d’apaiser la douleur et le stress, elles aident aussi à soulager l’anxiété et la dépression. Par exemple le rire est un élément simple pour déclencher la genèse d’endorphines. L’anandamide est particulière, c’est une substance naturelle du cerveau. Elle supprime la mémorisation des faits déplaisants et procure un sentiment d’extase et de plaisir. Et enfin, la sérotonine est diffusée quand on se sent important et utile. La sécrétion de la sérotonine, a lieu par exemple quand on remémore des moments que l’on a pu réaliser dans le passé.
Pourquoi dit-on que la passion passe, ou encore que l’amour ne dure que trois ans ? C’est tout simplement, qu’au bout d’un certain temps le cocktail magique constitué de substances biochimiques empêchant de ressentir de la méfiance à l’égard de son partenaire va s’estomper. Nos œillères tombent et nous devenons plus sensibles aux défauts de l’autre. C’est la fin de l’amour passion, caractérisée par un retour au fonctionnement de base du cerveau. Toutefois, la passion qui s’épuise après quelques années peut succéder à la complicité dans le couple et à l’attachement. Un amour certainement moins passionnel mais tout aussi prenant. Ce sont d’autres sentiments et d’autres ressentis qui s’installent en nous.
La rupture, le sevrage brutal
A savoir que s’il y a rupture dans la période la plus forte de dépendance, il y a un sevrage brutal qui peut causer une douleur physique et psychique. Alors à quand une pilule pour guérir le chagrin d’amour ? C’est en tout cas ce que pourrait suggérer Alain Brunet, professeur psychiatre canadien, qui s’est fait connaître en France au moment des attentats en réalisant des essais cliniques sur des victimes de stress post-traumatique. Au cœur de cette thérapie : le propranolol, un médicament de la classe des « bêta-bloquants », qui a pour effet de ralentir le rythme cardiaque ainsi que de diminuer le stress, a montré son intérêt dans le stress post-traumatique associé à une psychothérapie. De quoi mieux vivre son chagrin d’amour ! Ce que l’on peut se demander c’est à quand un médicament pour tomber amoureux ?
On vous rassure le mystère complexe de l’amour ne pourra jamais se résumer uniquement aux hormones et neurotransmetteurs, les recherches ne sont pas encore terminées et il y a des divergences de comportements amoureux entre cerveau masculin, et cerveau féminin. Mais ce qui est certain c’est que l’amour repose sur un subtil équilibre entre de nombreuses molécules dont les récepteurs ne fonctionnent pas de la même manière sur tous les individus. Alors vive l’amour !